19 avril 2006

Le procès Oran Baskin

Poursuite du procès d'Oran Baskin :

En dépit des protestations du professeur Kaboglu qui réclamait immédiatement l'annulation des poursuites lancées contre le professeur Oran et lui-même, le procès a été ajourné jusqu'au 10 mai, pour l'audition des témoins.

Les poursuites pour "humiliation publique des autorités de la Cour ayant été abandonnées, lle procès se poursuit autour de l'article 216, qui punit "l'incitation publique dangereuse à la haine et à l'inimitié." La Cour a entendu 6 ou 7 témoins impliqués dans le vote du fameux rapport. Le professeur Oran a réagi à cette audition : "Même si tous les témoins déposaient contre nous, selon quel article du code pénal serions-nous condamnés ?... Même en cas d'acquittement, après ce qui est arrivé à des personnes à qui l'on avait demandé de préparer un rapport officiel, à quel expert demandera-t-on désormais des rapports ? Quel experts écrira un rapport pour vous après cela ? ?"

Le professeur Ibrahim Kaboglu, a remis à la Cour 9 pages en addition à sa précédente défense. Il a déclaré que l'institution judiciaire de l'Etat a fait un procès à une autre institution d'Etat, le BIHDK qui a été instaurée légalement pour promouvoir et protéger les droits de l'homme.

Ibrahim Kaboglu a aussi indiqué que cette affaire était une atteinte à la liberté d'expression et d'opinion et montrait bien que la Turquie essayait de mettre un couvercle sur ses problèmes. Selon lui, l' article 301 est en violation avec la constitution, il demande donc que la Cour renvoie le problème à la Cour constitutionnelle.

Le professeur Kaboglu a ajouté que cette affaire avait déclenché une vague d'indignation non seulement en Turquie mais dans plusieurs pays, en demandant à ce que le procès soit tout de suite annulé. Malgré cela, le juge n'a fait que reporter les audiences au 10 mai pour entendre d'autres témoins.

Environ 25 témoins ont été entendus depuis le 15 février, ouverture du procès. Le Procureur d'Ankara, Nadi Turkaslan (retenez bien ce nom, c'est un génie en son genre) est l'illustre juriste qui a préparé l'acte d'accusation le 14 novembre 2005, et semblant atteint, de son propre aveu, de la "paranoïa de Sèvres".

Le professeur Oran croit, lui, que d etels problèmes autour de la liberté d'expression en Turquie sont issus d'une réaction face aux dernières actions du PKK : "La société en est venue à croire que son identité nationale était menacée, ce qui à son tour a influencé la justice. En cette période électorale, le gouvernement a fait marche arrière devant le nationalisme turc."

Le joçurnaliste Andrew Finkel, qui eut lui même à faire face à un procès pour un article intitulé "Sirnak 1988" dans le journal Sabah résume ainsi son impression de journaliste étranger travaillant sur le sujet de la liberté d'expression en Turquie. "Vous êtes invité à un dîner. On vous demande comment est la soupe. Pour ne pas être impoli, vous répondez qu'elle est bonne. On vous demande dire la vérité. Mais si vous dites qu'elle est unpeu trop salée, vous vous attirez la réponse "Honte, honte !"

Finkel insiste sur le fait qu'aussi longtemps que les journalistes ne se sentiront pas libres et n'agiront pas bravement, les lois elles-mêmes auront peu de sens. Il note que le comportement de certains de ses collègues l'a attristé. "Si nous, en tant que journalistes ne faisons pas preuve de courage, comment pouvons-nous attendre du gouvernement qu'il se comporte avec courage ?" (source biannet.org).